RETOUR À LA RECHERCHE

Le Défaut de L’Assuré de Mitiger Ses Dommages N’est Pas Sans Conséquence…

October 27, 2014

9124-4541 Québec inc. et al c. Intact compagnie d’assurance et al, 2014 QCCS 42501

Suite à un incendie ayant endommagé une usine de transformation de volaille et à un refoulement d’eau survenu quelques temps après dans les bureaux administratifs des demanderesses, ces dernières, insatisfaites de l’indemnité versée par leur assureur réclament une indemnité supplémentaire d’un peu plus de 8 millions de dollars pour des dommages à l’usine, aux équipements, aux bureaux et pour une perte d’affaires ainsi que des frais supplémentaires.

De façon générale, les demanderesses reprochent à leur assureur d’avoir fait preuve d’incompétence et de mauvaise foi dans le traitement des réclamations en n’ayant fait aucune intervention particulière immédiatement après les sinistres. Dans un jugement du 3 septembre 2014, le juge Jacques Blanchard ne fait pas droit aux principales réclamations des demanderesses parce que ces dernières n’ont pas minimisé leurs dommages en ne suivant pas les recommandations de leur assureur de procéder rapidement à des travaux de réparation. Notons que les travaux à l’usine et dans les bureaux n’avaient toujours pas été effectués en date du jugement, les immeubles étant devenu entretemps insalubres et perte totale.

Dans sa décision, le Tribunal revient sur les principes de droit applicables en pareille situation, à savoir que l’assureur est tenu de payer l’indemnité résultant d’un sinistre, mais que ce dernier conserve la faculté de réparer, reconstruire ou remplacer le bien assuré. En contrepartie, les assurés ont l’obligation de ne pas abandonner le bien endommagé et d’en faciliter la sauvegarde.

En l’espèce, concernant l’usine, l’assureur avait recommandé aux demanderesses de placarder les ouvertures occasionnées par la lutte contre l’incendie dès le lendemain du sinistre, ce qui n’a été fait qu’un mois plus tard. Par ailleurs, l’assureur avait décidé de procéder rapidement à une démolition sélective des parties endommagées. Les assurées, n’étant pas en accord avec cette position, ont plutôt décidé de ne rien faire, commettant de ce fait une faute en ne minimisant pas leurs dommages. En effet, le Tribunal a déterminé que l’intervention choisie par l’assureur était justifiée et que les demanderesses ne se sont pas comportées en personnes raisonnables en retardant le placardage, en ne procédant pas à la démolition sélective et en laissant l’immeuble se dégrader. Ce faisant, le lien de causalité a été brisé et l’assureur ne peut être tenu responsable des dommages qui découlent du non-respect de l’obligation de minimisation des assurées.

La décision du Tribunal est la même pour les équipements dans l’usine. En fait, si les demanderesses avaient procédé à la démolition sélective tel que prévu, les équipements auraient alors pu être nettoyés et sauvés.

Pour ce qui est des bureaux administratifs endommagés par un refoulement, l’assureur a recommandé dès le lendemain aux demanderesses d’assécher le plancher et a autorisé les travaux de réhabilitation un peu plus d’un mois plus tard. Le Tribunal a déterminé que le bungalow n’était pas encore perte totale au moment où les travaux ont été autorisés, et ce, bien que l’assureur aurait dû agir plus rapidement. Par contre, les assurées auraient dû procéder aux travaux dès leur autorisation au lieu de laisser le champ libre aux moisissures. Les dommages ainsi réclamés ne sont dus qu’à l’aggravation des dommages causés par l’inaction des demanderesses.

Pour ce qui est de la perte d’affaires, le Tribunal, évalue que les opérations auraient pu être relancées 12 semaines suivant l’incendie si les demanderesses avaient suivi le plan établi par l’assureur. Compte tenu des frais variables non engagés pour cette période, le Tribunal a évalué qu’il n’y avait pas eu de perte d’exploitation.

En somme, le Tribunal n’a fait droit qu’à la réclamation de 10 000$ en frais supplémentaires, tel que prévu par la police, tous les autres dommages réclamés étant en lien avec l’inaction des demanderesses.

1  Cette décision a été portée en appel.

Ne manquez pas les derniers développements en droit canadien des assurances

LIRE LA SUITE